Montres de prestige Rilogi



HOMMAGE A LA COMEX PAR MARCELLO PISANI




C'est avec une immense tristesse que je publie cet article, la traduction d'un texte écrit par Marcello, en effet, il vient de nous quitter brutalement.
Nous discutions ensemble 2 ou 3 jours avant que je n'apprenne la terrible nouvelle, je lui avais parlé de cette traduction, de mon souhait de diffuser un peu plus sa passion,  il m'avait dit en être honoré, je l'avais alors remercié et dit que c'était moi qui étais honoré.
C'est un hommage à la Comex, mais aussi un hommage à Marcello.

Riposa in pace Zio Marcì


Comex, culte et mysticisme d'une montre
 
Tu sais déjà que tu t'ennuieras à mort, ma tu dois tout de même t'y rendre: ils t'ont invité à un diner entre collègues avec qui tu as peu de choses à partager, à part la profession, et tu t'es préparé à écouter pendant des heures des bavardages sans aucun intérêt.
Alors que tu vas entrer, tu donnes un coup d'œil à ta montre, tu sais parfaitement quelle heure il est, mais tu sais également que la voir te donneras la force de supporter les évènements: en une fraction de seconde tu remarques, dans l'ordre, la lunette (elle semble noire comme les autres, mais au soleil, qui sait pourquoi, elle tire sur le bleu nuit, on dirait la couleur de la mer à quelques centaines de mètres de profondeur).
Le verre bombé qui ressort de la lunette, comme un cri, et finalement le petit lit blanc sur le cadran avec les cinq lettres magiques reposant dessus. 
Oui, effectivement, les points de tritium (légèrement plus grands par rapport au modèle "civil" entre autre car le verre bombé crée un effet loupe) sont encore très blancs, et cela plait peu à tes amis collectionneurs de la "vielle école" (ils préfèrent ceux qui ont jauni, voire même ceux qui sont devenus marrons) mais tu n'y peux rien si cette montre a toujours travaillé dans les mers froides (Mer du nord ou autre), peut etre parceque le plongeur à qui elle a été assignée était particulièrement résistant au froid!
 
Dans la dernière fraction de seconde qui précède ton entrée, tu es encore à temps de remarquer, pour la millième fois, que le fond du cadran vire à l'anthracite (à cause de l'humidité d'au moins 10 ans de service) 
Si tu avais le temps pour de l'observer à la loupe, tu pourrais voir que quelques lettres de la certification de chronomètre tamponnées sur le cadran ont commencé à s'effriter et donc à perdre de leur cohésion : mais ce phénomène ne te préoccupe pas car tu sais très bien qu'il est du essentiellement à la pression et donc, tu sais que ta montre ne court plus de danger (étant donné que tu l'enlèves même pour prendre ta douche)
 
Finalement tu es entré et tu salues d'un air absent les autres invités qui sirotent une boisson dont tu ignores le nom et à la saveur indéfinissable.
Tu regardes autours de toi et machinalement tu essaies de voir ce que les autres invités ont au poignet, il y en a un qui se pavane avec un chronographe qu'il vient tout juste d'acquérir, son cadran est en véritable peau de kangourou (qui sait ce qu'a bien pu lui faire cette pauvre bête, te questionnes-tu alors) et un autre avec une montre multifonctions capable de mémoriser les temps de cuissons de 30 sortes de pates différentes (enfin quelque chose d'utile).
A table te voilà assit en face du propriétaire du chronographe "Australien", et tu te rends compte que lui, ayant remarqué ta curiosité, cherche à son tour à découvrir ce que tu as au poignet: tu baisses immédiatement la manche de ta veste car tu veux éviter de donner les habituelles explications à rallonge.
Le repas se poursuit sans que tu ne fasses réellement attention aux saveurs de la nourriture et tu te mets à écouter les voisins qui décrivent avec emphase les sensations que donnent leurs nouveaux "jouets" c'est alors que tu te rappelles les sensations que tu éprouves toi même lorsqu'elle à ton poignet:
 
Devant toi se forme l'image d'une des plateformes pétrolières de la Mer du Nord (Ekofish? Torbotten?) dans une aube hivernale.
Dans le ciel, comme tous les matins, passent deux Tornado patrouilleurs avec le camouflage typique de l'Atlantique Septentrional: ils proviennent d'une base voisine de la RAF et sont en mission de reconnaissance à basse altitude jusqu'aux limites des eaux territoriales Norvégiennes; les pilotes font quelques tours à proximité de la plateforme en guise de salut puis s'éloignent (cherchent-ils des navires de pêches espions du "bloc" ou des sous-marins? Probablement les deux) 
 
La tache pour laquelle l'équipe dans laquelle "ton" plongeur, le porteur de la montre, qui travaille comme superviseur (après plus d'un an passé en saturation à respirer un mélange contenant de l'hélium, il est juste que ce soit aux autres de plonger) consiste à réparer un ancrage de la plateforme à une profondeur maxi de 80 mètres (donc, pas besoin de saturation car jusqu'à 100 mètres un professionnel travaille sans soucis avec le mélange d'air 'normal')
L'équipe est composée d'un chef très expert avec un passé, avant d'intégrer la Comex, impressionnant ("Ecole de déminage" de la Marine Nationale avec habilitation pour les déminages sous-marins et ce, jusqu'aux limites permises par le mélange respiratoire trimix) et de deux plongeurs tout juste sortis des difficiles cours de "perfectionnement" de la Comex mais qui, quoi qu'il en soit, ne sont pas des débutants (ils proviennent respectivement de la  Marine Royale Anglaise et des Nageurs de Combat Français)
A propos des 100 mètres, cette mesure te fait revenir en tête la profondeur à laquelle ont sombré le Kursk et le gros "Jean Claude" (appelons le ainsi) intervenu pour ouvrir le portillon après que, deux jours durant, les plongeurs Russes aient fait de nombreuses tentatives inutiles: Lui, en revanche, il avait réussi à l'ouvrir en 45 minutes et ce malgré la non compatibilité du portillon avec ceux, Nato, lui etant plus familiers, mais tu sais très bien que lui (un top diver) travaille à 100 mètres de profondeur comme si il était dans une piscine et qu'il est sorti des meilleures écoles au monde.
 
 
Pendant qu'autours de toi continuent les bavardages, tu te rappelles d'avoir été ému (mais tu n'en as pas honte) quand tu as su qu'il avait été voir les parents de ceux tombés à Murmansk pour leur présenter les condoléances de l'équipe de sauvetage Anglo-française.
 
Cela te fait penser aux nombres de plongeurs reposant sur le fond avec leurs montres au poignet (comme celui qui, dans les années 70, n'est jamais revenu d'une mission au large du port de Brest alors qu'il portait sa fidèle Submariner avec valve)
A chaque fois que tu penses, comme maintenant, au prix qu'ont payé ces hommes en terme de vies, de sacrifices et de dur travail dans un environnement hostile pour créer, d'abord, et maintenir ensuite, le gigantesque flux d'énergie nécessaire à la survie du monde occidental, tu te rends compte que tu as une dette envers eux et que si tu portes cette montre, c'est aussi pour ne pas les oublier.
 
Marcello Pisani





Rejoindre Rilogi sur Facebook Suivre Rilogi sur Twitter les images de Rilogi sur Pinterest Rilogi sur Instagram